L'ECOLE DE LA VIE
Les fondations d'un jeune rêveur
Nous sommes tous façonnés par l’éducation et les valeurs reçues par nos parents, mais aussi et surtout par nos expériences de vie. Certaines de ces expériences se construisent à travers nos relations familiales, nos pratiques sportives ou culturelles. D’autres prennent racine dans le premier sanctuaire du vivre-ensemble : l’école.
J’étais un élève moyen, discret, qui ne faisait pas de vagues sur le plan comportemental. Mes parents avaient choisi de m’inscrire dans un collège privé et Ma sixième s’est déroulée sans encombre. Parmi mes souvenirs extra-scolaires, un moment précis me revient en mémoire : une victoire lors du tournoi de football de la pause déjeuner. Ce jour-là, j’étais dans les buts pour la finale, disputée devant tous les collégiens. Par miracle (car je n’ai toujours pas d’explication logique), j’ai arrêté un penalty. Ce fut mon instant de gloire : quelques jours durant, j’ai même reçu l’attention de la gent féminine ! À l’époque, comme beaucoup de jeunes footeux, je rêvais de devenir joueur professionnel.
Mon aventure footballistique commença au poste d’attaquant. Mes meilleures années furent celles des pupilles, et un tournoi de Pâques organisé par mon club reste gravé dans ma mémoire. Nous avions remporté le tournoi à 7 devant un public bruyant, et j’avais marqué le but décisif. La sensation générée par un pic d’adrénaline était indescriptible, comparable à celle des professionnels. Certes, notre public n’était pas aussi vaste que le stade de Maracana au brésil, mais pour nous, c’était notre coupe du monde. Par la suite, j’ai eu d’ailleurs l’immense privilège d’être recruté par l’un des meilleurs clubs de ma ville et vécu certains moments comparables à ceux des professionnels dans l’approche et la gestion de groupe. Mais à 14 ans, je voulais juste jouer au football et prendre du plaisir sans tactique ni pression. Malheureusement, mon niveau était insuffisant pour rejoindre un club professionnel. L’histoire dira que je ne rejoindrai ni l’équipe de France de 1998, ni même un club professionnel.
Cependant, deux expériences de ma vie de collégien influenceront beaucoup mon avenir professionnel : Le sport et la télévision.
J’ai toujours aimé le sport et les émissions sportives. Je me souviens des dimanches où, de retour de chez ma grand-mère, nous regardions Stade 2. C’est ainsi que j’ai découvert avec un immense intérêt le Marathon des Sables via un reportage sur sa première édition en 1986. Avec une certaine naïveté, j’avais pensé : « Courir si lentement, ça n’a pas l’air si compliqué ? Un jour, je tenterai quelque chose dans ce genre. » Jeune, ma chambre était ornée de posters de légendes de l’époque : Platini avec son maillot de Saint-Étienne, Noah sur la terre battue de Roland-Garros, et Bernard Hinault portant fièrement son maillot jaune dans le Ventoux. Le Blaireau, dans les ascensions mythiques du Tour de France, m’impressionnait.
La deuxième anecdote marquante fut ma participation à un tournage en sixième. Mon professeur d’art plastique recherchait des volontaires pour un film sur les hommes préhistoriques, tourné dans des troglodytes. Déguisés avec des peaux de bêtes, nous poussions des cris au lieu de parler. Ce projet, destiné à des élèves en difficulté pour les stimuler autrement, fut un véritable succès. C'était une première expérience et j'avais beaucoup aimé jouer un rôle et raconter une histoire devant une caméra. Des années plus tard, je suis retourné au collège pour retrouver une copie du film, mais à mon grand regret, il n’en restait aucune trace.
Mon parcours scolaire ne fut pas toujours idyllique. En cinquième, je me retrouvais dans une classe au climat tumultueux. Une scène particulière me revient : Un camarade qui soulève le professeur de technologie par le col d’une main et, de l’autre, le menace avec une chaîne. Trop jeune, trop influençable, cette ambiance m’aidera juste à redoubler.
Ma seconde année de cinquième m’a permis de trouver une certaine stabilité, notamment grâce à l’accompagnement d’un professeur au profil atypique. À la fois enseignant en sport et … en français (plutôt surprenant, non ?), il adoptait une approche originale : loin des cours classiques et monotones, il nous impliquait activement dans des projets stimulants en français, rendant l’apprentissage bien plus vivant et engageant. Une approche inspirante qui a marqué ma façon de transmettre aujourd’hui.
Puis vint la fameuse réunion de classe de troisième. Mon professeur principal, un frère qui portait toujours à sa bouche une «brune » éteinte dans la cour, annonça publiquement devant tous mes camarades : « Monsieur TAVEAU, malgré vos efforts (13,5 de moyenne au dernier trimestre), nous vous recommandons une filière professionnelle. » Cette déclaration heurta mon ego, car je souhaitais poursuivre dans la voie générale. Mon père, cependant, décida pour moi : ce sera la comptabilité. « Ça te servira toujours la compta » disait-il. Il enchaina avec « Et en plus tu apprendras la dactylographie ». Il m’inscrivit dans un lycée professionnel privé, affirmant que ces études me seraient utiles un jour. A l'époque, je n'étais pas convaincu.
Malgré une certaine réticence pour l’administratif (à la limite de l’allergie), j’ai obtenu mon diplôme sans trop de difficulté. Mon père avait raison : Aujourd’hui, je tape sur un clavier AZERTY avec mes dix doigts, sans même le regarder.
Côté comptabilité, cette première approche m’aura permis d’élargir mes horizons et de mieux comprendre un compte de résultat ou un bilan. Ce n’est pas rien, et cela aura forcément un impact sur la suite de mon parcours.
Je poursuivis avec un bac pro commerce service en alternance dans un magasin de bricolage. Pendant deux ans, je découvris différents rayons, notamment celui de la décoration. Ce fut une période marquée par des rencontres enrichissantes avec des collègues au parcours varié. Le magasin ne survécut pas face à des enseignes comme Leroy Merlin, mais les souvenirs de cette ambiance restent encore intacts.
Finalement, comme mon BEP, j’ai obtenu mon bac pro avec une moyenne modeste de 10,4. On dit que le travail paie toujours, et ma note reflète fidèlement l’effort fourni à l’école pendant ces deux années.
En revanche, lors de la soutenance orale professionnelle, c’est plutôt mon talent oratoire qui a fait la différence. Un 17 coefficient 6 est venu compenser mes résultats bien moins brillants en français et en mathématiques, donnant à cette épreuve un parfum d’état de grâce.
Peu importe : Avec un bac en poche, j’étais prêt à servir mon pays.

Jour du grand oral de bac