LA PARENTHESE STUDIEUSE

Pour être légitime

 

Peut-on vraiment vivre de la scène quand on ne s’appelle pas Gad Elmaleh et qu’on n’a pas franchement envie de grimper à Paris ?

Même si mes besoins financiers n’ont jamais été le moteur de ma vie, le rythme des représentations n’était pas encore suffisant pour que cela devienne une réalité. Puis, un événement marqua un tournant dans ma réflexion sur mon avenir. La directrice de l’école dans laquelle j’enseignais depuis deux ans m’annonça que je ne pourrais plus continuer. Je connaissais la raison, mais je m’étais accroché tant qu'elle faisait le nécessaire pour me couvrir : En effet, Mon niveau de diplôme – un Bac + 2 – ne correspondait pas aux exigences requises par l’éducation nationale : il devait être supérieur à celui de mes étudiants. En clair, pour continuer à enseigner, je devais obtenir un Bac + 5.

Que faire alors ? Tout arrêter et me consacrer à 100 % à Paradise, quitte à abandonner ce que je considérais comme l’un de mes "taf alimentaires" périodiques ? Ou bien prendre cette contrainte comme une opportunité déguisée, une étape nécessaire pour avancer vers de nouvelles perspectives tout en assurant mes arrières ?

Mon premier réflexe fut d’explorer la Validation des Acquis et des Expériences (VAE). Une idée simple, mais porteuse d’espoir : transformer mon parcours professionnel en une reconnaissance académique. C’était une belle promesse, mais je m’aperçus rapidement que le commerce, qui semblait le plus proche de mon expérience, ne collait pas à ma réalité terrain. Après avoir parcouru le référentiel, je dus accepter l’évidence : la VAE n’était pas une solution pour moi.

La spécialiste avec qui j’échangeais me suggéra alors une autre piste : une formation courte certifiante. En réfléchissant, le domaine des ressources humaines semblait correspondre le mieux à mon parcours. Ça tombait bien, elle connaissait une école proposant des formations courtes en RH. Je pris contact, et c’était parti pour une nouvelle aventure de huit mois, tout comme une poignée d’apprenants venus de toute la France.

Ce fut une période intense. Les cours se déroulaient intégralement à distance, alternant classes virtuelles et e-learning (ces fameuses présentations PowerPoint animées où un professeur nous parle pendant des heures via Teams). Pour obtenir le titre visé – un mastère en management RH –, il fallait valider des blocs de compétences à travers des études de cas. Enfin, le tout devait être validé  par une soutenance finale reprenant l’ensemble des blocs.

Je ne vais pas prétendre que j’avais planifié de valider cette formation pour une date bien précise, mais parfois, la vie nous envoie des signes : cette soutenance tombait le jour de mes 50 ans. Résultat : j’obtins mon diplôme et terminais major de promotion. En toute modestie, nous n’étions que huit. Et l’oral, qui comptait pour moitié de la note finale, jouait clairement en ma faveur : Lorsque vous êtes totalement à l’aise dans un domaine, ça fait toute la différence.

Diplôme en poche, je viens fièrement le présenter à la directrice. Elle me félicite, et quelques semaines plus tard, je commence une nouvelle rentrée avec un sentiment d’accomplissement. Pourtant, l’été suivant, elle m’annonce que mon contrat ne sera pas reconduit. La suppression de mes matières, combinée à une réduction des effectifs, obligeait l’établissement à privilégier les enseignants salariés.

Tout cela pour ça, diront certains. Le jeu en valait-il la chandelle ? Difficile de ne pas ressentir une pointe d’amertume. Et pourtant, je peux toujours me targuer d’avoir franchi une étape importante : obtenir un Bac + 5. Ce n’est peut-être pas une victoire éclatante, mais c’est un symbole de persévérance. Et si je devais recommencer ? Sans aucune hésitation. Chaque parcours, même semé d’embûches, mérite d’être tenté.

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